Diagnostic patrimonial de la Maison des Dames et des P.T.T., 41, rue de Lille.
Alliant l’Arts & Crafts britannique à un Art Nouveau plus parisien, la Maison des Dames des Postes et des P.T.T. est construite en 1905 par l’architecte havrais Eugène Bliault.
Avec un programme à la dimension sociale affirmée et une structure novatrice de ciment armé, elle fait alors figure d’exception.
Se concentrant sur le socle de l’édifice, le diagnostic patrimonial identifie les différentes campagnes de travaux entreprises depuis sa livraison.
Il met notamment en valeur les appauvrissements et dégradations qui altèrent l’édifice aujourd’hui.
Ces études se synthétisent dans une critique d’authenticité et un diagnostic sanitaire exhaustifs.
Présentation de l’architecte.
Eugène Jules Bliault (1866-1925)
Originaire du Havre, l’architecte de la Maison des Dames des P.T.T. entame sa formation dans cette ville en 1884 pour la compléter dix-neuf ans plus tard, en 1903, à l’École nationale et spéciale des Beaux-Arts de Paris.
Si le peu d’informations dont nous disposons sur sa formation ne suffit pas à expliquer la longueur de ce cursus, on note toutefois cinq échecs successifs à l’entrée aux Beaux-Arts (1886-1888) et une carrière amorcée avant la finalisation de ses études.
On relève notamment sa participation à l’Exposition universelle de 1900 comme Inspecteur des travaux du Palais des Congrès et de l’Économie sociale. Bliault y construit le pavillon de l’Union Centrale des Arts-Décoratifs en collaboration avec l’architecte décorateur Georges Hoentschel. Réalisé dans un style Louis XV couramment utilisé pour les hôtels particuliers contemporains, l’édifice se distingue par sa sculpture. À l’extérieur comme à l’intérieur, des rinceaux colonisent consoles, corniches et parois dans un style proche de l’Art Nouveau Introduit à Paris cinq ans auparavant par le galeriste Bing, ce dernier y est alors à son apogée.
Trois ans plus tard, Bliault est diplômé en présentant un projet de Cercle téléphonique au 16, rue de Grenelle. C’est ce travail varianté qui sera réalisé au 41, rue de Lille, dans le 7ème arrondissement de Paris, en 1905. Dans un style éclectique associant un socle de pierre de taille à une élévation de briques d’argile, la Maison est construite en ciment armé. Si l’usage de la pierre renvoie au statut du quartier, celui de la brique et du ciment répond à la relative modestie du programme. Une ornementation discrète mais circulant dans l’ensemble de l’édifice rappelle le précédent du Pavillon de l’Union Centrale. Sous la forme de mosaïques de pierre au sol, ou peints au pochoir sur les parois ou encore façonnés en verrières, les motifs végétaux se conjuguent et donnent à lire l’édifice comme une œuvre d’art totale dont l’architecte dessine aussi une partie du mobilier. Concomitamment, Bliault publie La maison ouvrière et l’atelier familial. Ce texte consacré au confort populaire témoigne de l’attention qu’il porte alors au logement ouvrier.
Par la suite, l’architecte réalisera notamment le Grand Casino-Hôtel de Carolles-sur-Mer (Manche, 1906), une série de villas particulières et de maisons ouvrières et, enfin, une étonnante demeure bolivienne, le Palais Portales achevé deux ans après sa mort en 1927.
La relative modestie de l’œuvre de Bliault s’explique par son décès précoce et par la pluralité de son engagement d’architecte. On l’identifie notamment comme architecte/gérant du Musée social et gérant du Service immobilier du chocolat Menier. Actionnaire de la Maison des Dames, Gaston Menier recrute Bliault. Il semble que l’industriel libéral poursuivant les ambitions sociales de son père et l’architecte se soient retrouvés dans leur engagement en faveur de l’amélioration de la condition ouvrière.
Chevalier de la Légion d’honneur, officier de l’Instruction publique et chevalier du Mérite agricole, le fils d’un sous-brigadier des douanes havrais a produit une œuvre globale où la qualité architecturale se conçoit au service de l’intérêt général.
Localisation : 41 rue de Lille, Paris
Programme : Logement
Maître d’Ouvrage : NC
Mission : Diagnostic patrimoniale